Gustav Malher
Certaines mamans, pour leur fête, aiment recevoir des fleurs, d'autres du chocolat, d'autres encore des bijoux.
La mienne préfère que je lui offre un disque de Gustav Mahler ou, à la rigueur, un ouvrage consacré à son compositeur chéri.
Une vraie fan, ma mère ! Une groupie qui aurait suivi son idole dans le monde entier en hurlant à la fin du concert : GUSTAAAAAAAAAAAAAAAAAV, ich liebe dich !
J'en entends déjà certains qui disent :
"Ne parle pas de Mahler! Ou "un Mahler n'arrive jamais seul, parle de choses plus gaies !"
Têtu, je n'en ferai rien et rédigerai un article sur ce génial compositeur (n'ayons pas peur des mots) mort le 18 mai 1911, il y a tout juste cent ans (article rédigé en mai 2011).
Je profite donc de l'occasion pour rendre hommage à un homme plus connu de son vivant comme chef d'orchestre que comme compositeur et réfléchir, tout en le rédigeant, au cadeau original que je pourrais faire à ma mère.
Quel Mahler pour ma mère ? voilà la question.
Leonard Bernstein a beaucoup fait (tout comme Bruno Walter, puis Pierre Boulez et Claudio Abbado) pour relancer la carrière de Mahler à partir des années 60
Mais c'est surtout Luchino Visconti dans son chef d'oeuvre "Mort à Venise" tiré de la nouvelle de Thomas Mann et inspiré de la vie de Mahler qui a contribué à faire de Gustav, l'un des compositeurs les plus joués aujourd'hui.
Ecoutez l'adagietto de la 5ème symphonie qui a si fortement marqué les spectateurs du film. Bernstein dirige l'Orchestre Philarmonique de Vienne
BIOGRAPHIE :
(merci à Henry Louis De La Grange et Ludwig von Wiki pour leur éclairage savant)
Gustav Mahler est né le 7 juillet 1860 à Kaliste en Bohème, non loin de la Moravie, en Autriche-Hongrie (aujourd'hui la ville se situe en République Tchèque).
Maison natale de Mahler à Kaliste
Il est le deuxième des quatorze enfants de Bernhard et Marie Mahler dont huit mourront en bas âge.
D'origine juive, leur situation n'a rien d'enviable dans l'empire austro-hongrois.
Leur liberté de mouvement est limitée et seul le premier né a le droit de se marier. Les Mahler sont aubergistes et s'établissent à Jihlava en Moravie
(photo ci-dessous) lorsque le jeune Gustav a un an.
Il y passera toute son enfance.
En 1875, il est admis au conservatoire puis à l'université de Vienne où il étudie le piano avec Julius Epstein et partage la chambre d’Hans Rott. Il suit parallèlement des conférences données par Anton Bruckner à l’université de Vienne.
Dès sa jeunesse, le mysticisme catholique attire Mahler alors que les rituels juifs le laisseront toujours indifférents. « Il aimait l'odeur de l'encens et les chants grégoriens et ne pouvait jamais passer devant une église sans y entrer ».
Il se fait baptiser à Hambourg au début de 1897 pour pouvoir être nommé à la tête de l'Opéra de Vienne, Cosima Wagner aussi antisémite que Richard, tente en vain d'annuler sa nomination.
Vienne devient en quelques années, grâce à Mahler, la capitale mondiale de la musique et de l'art lyrique
Selon le peintre et décorateur Alfred Roller, Gustav ne cacha jamais son origine juive mais ne s'en réjouit pas particulièrement et, à la fin de son mandat à l'opéra de Vienne, il a certainement souffert de l'antisémitisme larvé ou déclaré d'une partie du public.
Caricature de Mahler dirigeant l'orchestre de l'Opéra de Vienne.
Certains lui reprochaient sa fébrilité, voire son agitation. Pourtant il a révolutionné la direction d'orchestre et "réveillé" l'Opéra de Vienne qui connaîtra, sous sa baguette, ses années les plus glorieuses.
Sa musique sera bannie sous le Troisième Reich.
L'inspiration chrétienne se fait jour dans les Symphonies n° 2 et 8 alors que l'élément juif est plus difficile à cerner. « Je suis trois fois apatride ! Comme natif de Bohême en Autriche, comme Autrichien en Allemagne, comme juif dans le monde entier » dit-il.
Dès 1886, sa vie sentimentale est orageuse lorsqu'en novembre 1901, Gustav Mahler, directeur de l'opéra de Vienne et compositeur déjà célèbre, rencontre la ravissante Alma (1879-1964) sa cadette de de 20 ans, fille du peintre paysagiste Emil Schindler, mort en 1892 et dont la mère s'est remariée avec le peintre Carl Moll, élève de Schindler.
Tiens, tiens, bonne idée de cadeau cette autobiographie !
Issue d'un milieu cultivé et excellente pianiste, elle s'intéresse à l'art et étudie la composition avec Alexander von Zemlinsky, beau-frère et ancien professeur de Schönberg.
Fasciné par sa beauté et son indépendance d'esprit, Mahler l'épouse en 1902. Elle métamorphose la vie du compositeur qui rencontre, grâce à elle des artistes éminents comme le poète dramatique Gerhart Hauptmann, les peintres Gustav Klimt et Kolo Moser ou le chef de file de l'avant-garde musicale Viennoise Arnold Schönberg dont Mahler devient le défenseur et le protecteur.
Souvent sacrifiée au travail d'un mari exigeant, Alma renonce à la composition pour partager la vie intellectuelle et sensible de cet époux qu'elle considère « comme l'homme le plus noble, le plus pur » qu'elle ait jamais connu.
Deux filles naissent en 1902 et 1904 Maria et Anna.
Une touchante photo pour la fête des mères. Encore une idée de cadeau dans un beau cadre !
Le 5 juillet 1907, la fille aînée Maria décède, emportée par la scarlatine. Une grave crise éclate dans le couple au cours de l'été 1910 lorsque Alma, lui reprochant de ne pas faire son devoir d'époux, succombe au charme du jeune architecte Walter Gropius, fondateur du Bauhaus.
Le divorce étant exclu, Mahler consulte *Sigmund Freud avec lequel il fait une discussion-promenade de quatre heures.
Sigmund und Gustaaaaaaav
"Gustav, répète après moi, lui ordonne Sigmund :
"ICH BIN FROH, (JE SUIS HEUREUX)"
Et si j'offrais cette caricature à ma maman ?
L'entretien semble avoir été bénéfique au compositeur qui écrira à sa femme : « …Suis joyeux. Conversation intéressante… ». Alma sera aux côtés de Gustav pour sa quatrième saison aux États-Unis et jusqu'à la fin de la vie de Mahler.
C’est durant sa dernière visite aux États-Unis où il dirige l'orchestre philharmonique de New-York, qu’il contracte une infection généralisée le 20 février 1911. Gravement malade il quitte New-York pour être traité pendant une semaine à Paris. Perdu, il demande à retourner à Vienne, où il décède d'une endocardite le 18 mai 1911 (à 50 ans), laissant inachevée sa dixième symphonie.
Le dernier mot qu’il prononce, un doigt levé dirigeant un orchestre invisible, est : « Mozart ! » (« mon petit Mozart ») adressé à Alma.
Il est enterré dans la capitale autrichienne, au cimetière de Grinzing.
OEUVRE :
A cheval sur le XIXe siècle classique et romantique et le XXe moderne, l'oeuvre de Mahler est profondément originale.
On reconnaît une composition de Mahler dès les deux premières minutes.
N'est-ce pas, maman ?
Gustav, une véritable éponge cet homme-là, a été influencé par Bach puis Haydn, Mozart, Beethoven, Schubert (Ecole de Vienne)
Schumann, Brahms, Mendelssohn, Franz Liszt et Anton Bruckner (les romantiques),
Cependant l’influence décisive de son œuvre fut Richard Wagner, le seul selon lui dont la musique possédait réellement un "développement"
Gustav Mahler laisse dix symphonies et plusieurs cycles de Lieder.
Kindertotenlieder 1. Chants des enfants morts (la preuve que les chants les plus beaux sont les plus désespérés
Ecoutez maintenant la superbe voix de Kathleen Ferrier, dirigée par Bruno Walter dans "Das Lied von der Erde"
Mais, si, mais si, il arrivait parfois à ma mère, pardon... je veux dire à à Mahler d'être gai et sa musique s'en ressentait comme dans sa première symphonie
Plus grave est la sixième dirigée par Claudio Abbado, grand connaisseur et amoureux du compositeur. J'adore l'ouverture
En guise de conclusion, laissez-vous envouter par le finale de la huitième symphonie que certains considèrent comme un chef d'oeuvre absolu
Magnifique finale de la symphonie n°8. La seule qui connut le succès du vivant du compositeur.
Aux mélomanes amoureux de Mahler, assez courageux pour venir à bout de trois gros tomes, je recommande cette bio remarquable du plus grand spécialiste du génial compositeur :
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