Voyages de rêve, rêves de voyages

Voyages de rêve, rêves de voyages

Georges Brassens

Ouf j'ai enfin terminé mon article consacré à mon troubadour contemporain préféré :

Georges Brassens (Tonton Georges pour les intimes)

 

C'est le poète qui m'a fait le plus voyager et rêver. Je l'ai suivi dans son univers peuplé de copains, de voyous, de pandores, de braves gens, de grisons, de cousettes, de blanches cailles, de curés, de filles de joie... 

  

 

Aussi loin que mes souvenirs remontent j'ai toujours été fan du poète anar et moustachu (l'un n'empêche pas l'autre).

Certains préfèrent sa moustache à ses idées d'autres ses idées à sa moustache, d'autres comme moi, considèrent que " tout est bon chez lui, il n'y a rien à jeter " et acceptent le bonhomme tel qu'il est.

Je l'évoque au présent tant son souvenir reste vivace.

 

Personnellement, je considère Brassens comme un modèle, un tonton, un père...

mais surtout 

un copain d'abord :

 Enregistrement effectué à Bobino en 1972. A la contrebasse Pierre Nicolas


Nous sommes en 2013. Si je compte bien cela fait 32 ans que Georges est parti à l'âge de 60 piges seulement.

  

L'enfance et la jeunesse de Brassens.

Biographie succinte établie grâce à la collection Seghers et à mon ami Wiki


Georges ouvre les yeux dans un quartier populaire de Sète (orthographié Cette à l'époque) le 22 octobre 1921 et les ferme à Saint-Gély-du-Fesc (également dans l'Héraut)  le 29 octobre 1981

La maison natale de Brassens au 54 rue de l'Hospice devenue la rue Georges Brassens. 

  

Sa mère, dont les parents sont originaires du sud de l'Italie est une catholique d'une grande dévotion. Veuve de guerre, Elvira épouse Jean-Louis Brassens en 1919, un entrepreneur de maçonnerie.

Le père de Georges est un homme paisible, généreux, libre-penseur, anticlérical et doté d'une grande indépendance d'esprit. Il influencera grandement le petit Georges.

Des parents avec deux caractères très différents, qui ont en commun : le goût de la chanson. Tout le monde chante à la maison. Sur le phonographe : les disques de MireilleJean NohainTino Rossi ou Ray Ventura et ses Collégiens.


  

Georges (2e en partant de la droite) et ses copains sur le plage de Sète

 

Georges Brassens à 18 ans (?) Il ne fume pas encore la pipe et ne porte ni polo ni moustache. 

 

En 1936, Georges découvre la poésie grâce à son professeur de français, Alphonse Bonnafé, alias « le boxeur ». Il ose même lui soumettre quelques-uns de ses vers. Loin de le décourager, l'enseignant lui conseille plus de rigueur et l'intéresse à la technique de versification et à l'approche de la rime.

À la poésie et à la chanson populaire s’ajoute sa passion pour les rythmes nouveaux venus d’Amérique qu’il écoute à la TSF : le jazz.

En France, Charles Trenet conjugue tout ce qu'il aime. Il sera un modèle.

« On était des brutes, on s'est mis à aimer les poètes. […] Et puis, grâce à ce prof, je me suis ouvert à quelque chose de grand. Alors, j’ai voulu devenir poète…»

 

Son intérêt croissant pour la poésie ne lui ôte pas le goût pour les « quatre cents coups ».

À 16 ans, au printemps 1938, il se trouve mêlé à une fâcheuse aventure. Dans le but de se faire de l'argent de poche, la bande de copains dont il fait partie commet quelques larcins. Par facilité, les proches en sont les principales victimes. Georges, de son côté, subtilise bague et bracelet de sa sœur. Ces cambriolages répétés mettent la ville en émoi. Lorsque la police arrête enfin les coupables, l’affaire fait scandale. Indulgent, Jean-Louis Brassens ne lui adresse aucun reproche quand il va le chercher au poste de police.

Pour saluer l’attitude de son père, il en fera une chanson : Les Quatre Bacheliers

« Mais je sais qu'un enfant perdu […] a de la chance quand il a, sans vergogne, un père de ce tonneau-là ». Par égard pour son père, il ne la chantera qu’après sa mort.

 

 

« Je crois qu'il m'a donné là une leçon qui m'a aidé à me concevoir moi-même : j'ai alors essayé de conquérir ma propre estime. […] J'ai tenté, avec mes petits moyens, d'égaler mon père. Je dis bien tenté…"

 

Ce passé mouvementé inspirera le poète dans le "Mauvais sujet repenti", "Je suis un voyou" et

"la Mauvaise réputation", son premier succès :


Pendant la guerre il profite d'une permission accordée pendant son STO en Allemagne pour fuir.

À Paris, il lui faut trouver une cachette car il est impossible de passer à travers les filets de la Gestapo.

Jeanne Planche,  une bretonne immigrée à Paris, de trente ans son aînée, accepte d'héberger ce beau jeune homme encombrant qui devient son amant (elle lui inspirera la chanson "Jeanne" et la "Cane de Jeanne")

 

 

 

 

Regardez cet intéressant documentaire consacré à cette femme généreuse et à la jeunesse de Brassens :


 

Avec son mari Marcel, elle habite une maison extrêmement modeste au impasse Florimont dans le 14e. en plein coeur du quartier breton de Paris tout près de la gare Montparnasse. Georges s’y réfugie le 21 mars 1944, en attendant la fin de la guerre.

  

Georges "se gratte le ventre", impasse Florimont

 

La carte d'identité de Brassens avec son adresse impasse Florimont


On se lave à l’eau froide, il n’y a ni gaz, ni électricité (donc pas de radio), ni le tout-à-l’égout. Dans la petite cour, une vraie ménagerie : chiens, chats, canaris, tortues, buse… et la fameuse cane. Georges est loin de se douter qu’il y restera vingt-deux ans

comme en atteste cette plaque :


 

En septembre 1946, il se lie avec des militants de la Fédération anarchiste pour écrire quelques chroniques dans leur journal, Le Libertaire, sous les pseudonymes de Gilles Colin ou Geo Cédille.  

 

Ce sont des articles virulents, teintés d'humour noir, envers tout ce qui porte atteinte aux libertés individuelles.

  

Pour ne pas attiser la jalousie de Jeanne, Georges a vécu des amourettes clandestines, passagères et surtout roturières évoquées dans cette chanson clin d'oeil à François Villon :

 

Moi, mes amours d'antan c'était de la grisette:
Margot, la blanche caille, et Fanchon, la cousette...
Pas la moindre noblesse, excusez-moi du peu,
C'étaient, me direz-vous, des grâces roturières,
Des nymphes de ruisseau, des Vénus de barrière

Mon prince, on a les dames du temps jadis qu'on peut (...)


Il y eut en particulier Jo, 17 ans (juin 1945 – août 1946). Une relation tumultueuse qui lui inspira peut-être quelques chansons : Une jolie fleurP... de toi et, en partie, Le Mauvais Sujet repenti 

 

Une jolie Fleur (avec paroles) :

 

En 1947, il rencontre Joha Heiman (1911-1999, morte dix-huit ans après lui et enterrée avec lui dans le cimetière marin de Sète).

Originaire d’Estonie, elle est son aînée de neuf ans – affectueusement, il l’appelle « Püppchen », petite poupée en allemand, mais ils l'orthographieront tous les deux « Pupchen » (c'est le nom gravé sur leur tombe). Désormais, on ne connaîtra pas d'autres conquêtes féminines au fidèle Brassens. Ils ne se marieront jamais ni ne cohabiteront.

Il lui écrira J’ai rendez-vous avec vousJe me suis fait tout petit (devant une poupée)SaturneLa Non-demande en mariage et Rien à jeter.

 

Saturne (avec les paroles)

 

 

Après plusieurs auditions infructueuses il est  auditionné par Patachou le jeudi 24 janvier 1952. Elle est d'emblée conquise. Les jours suivants, malgré son trac, Georges Brassens chante effectivement sur la scène du restaurant-cabaret de Patachou. à Montmartre.

 

 

Pour le soutenir, Pierre Nicolas, bassiste dans l'orchestre de la chanteuse, l’accompagne spontanément. Il s'agit de l'orchestre de Léo CLARENS, qui les accompagne dans un disque Philips où ils chantent en duo "Maman Papa" et "la légende de la nonne".

Au début des années 50, les talents de poète et de musicien de Georges sont arrivés à maturité. De nombreuses chansons sont déjà écrites. Pratiquement toutes celles de cette époque qu'il choisira d'enregistrer deviendront célèbres, comme Le ParapluieLa Chasse aux papillonsJ'ai rendez-vous avec vousBrave MargotLe GorilleIl n'y a pas d'amour heureux.

 

La personnalité de Brassens a déjà ses traits définitifs : la dégaine d'ours mal léché, la pipe et les moustaches, le verbe libre, imagé et frondeur et pourtant étroitement soumis au carcan d'une métrique et d'un classicisme scrupuleux, le goût des tournures anciennes, le culte des copains et le besoin de solitude, une culture littéraire et chansonnière pointue, un vieux fond libertaire, hors de toute doctrine établie, mais étayé par un individualisme aigu, un antimilitarisme viscéral, un anticléricalisme profond et un mépris total du confort, de l'argent et de la considération. Il ne changera plus.

 

Place maintenant à quelques unes de mes chansons préférées :

  

Aimant trop les femmes et sa liberté Brassens  refuse de "graver son nom au bas d'un parchemin" 

 

La non demande en mariage :

 

Enregistrement effectué à Bobino en 1967. A la contrebasse le fidèle Pierre Nicolas 

 

C'est grâce à un orage qu'il connaît son

"plus bel amour sur terre"

oui il le doit "au mauvais temps, il le doit à Jupiter"

 

 

Timide, modeste et réservé il souffre de sa notoriété et condamne les

"Trompettes de la renommée" :

 

Les femmes, l'amour, les copains, les flics, l'anticléricalisme et la mort sont ses thèmes de prédilection. Il défie et joue avec cette dernière dans de nombreuses chansons et a composé en y pensant cette merveilleuse

 

"Supplique pour être enterré sur la plage de Sète" :

  

La Camarde qui ne m'a jamais pardonné,
D'avoir semé des fleurs dans les trous de son nez,
Me poursuit d'un zèle imbécile.
Alors, cerné de près par les enterrements,
J'ai cru bon de remettre à jour mon testament,
De me payer un codicille.

Trempe dans l'encre bleue du Golfe du Lion,
Trempe, trempe ta plume, ô mon vieux tabellion,
Et de ta plus belle écriture,
Note ce qu'il faudrait qu'il advint de mon corps,
Lorsque mon âme et lui ne seront plus d'accord,
Que sur un seul point : la rupture.

Quand mon âme aura pris son vol à l'horizon,
Vers celle de Gavroche et de Mimi Pinson,
Celles des titis, des grisettes.
Que vers le sol natal mon corps soit ramené,
Dans un sleeping du Paris-Méditerranée,
Terminus en gare de Sète.

Mon caveau de famille, hélas ! n'est pas tout neuf,
Vulgairement parlant, il est plein comme un oeuf
Et d'ici que quelqu'un n'en sorte,
Il risque de se faire tard et je ne peux,
Dire à ces braves gens : poussez-vous donc un peu,
Place aux jeunes en quelque sorte.

Juste au bord de la mer à deux pas des flots bleus,
Creusez si c'est possible un petit trou moelleux,
Une bonne petite niche.
Auprès de mes amis d'enfance, les dauphins,
Le long de cette grève où le sable est si fin,
Sur la plage de la corniche.

C'est une plage où même à ses moments furieux,
Neptune ne se prend jamais trop au sérieux,
Où quand un bateau fait naufrage,
Le capitaine crie : "Je suis le maître à bord !
Sauve qui peut, le vin et le pastis d'abord,
Chacun sa bonbonne et courage".

Et c'est là que jadis à quinze ans révolus,
A l'âge où s'amuser tout seul ne suffit plus,
Je connu la prime amourette.
Auprès d'une sirène, une femme-poisson,
Je reçu de l'amour la première leçon,
Avalai la première arête.

Déférence gardée envers Paul Valéry,
Moi l'humble troubadour sur lui je renchéris,
Le bon maître me le pardonne.
Et qu'au moins si ses vers valent mieux que les miens,
Mon cimetière soit plus marin que le sien,
Et n'en déplaise aux autochtones.

Cette tombe en sandwich entre le ciel et l'eau,
Ne donnera pas une ombre triste au tableau,
Mais un charme indéfinissable.
Les baigneuses s'en serviront de paravent,
Pour changer de tenue et les petits enfants,
Diront : chouette, un château de sable !

Est-ce trop demander : sur mon petit lopin,
Planter, je vous en prie une espèce de pin,
Pin parasol de préférence.
Qui saura prémunir contre l'insolation,
Les bons amis venus faire sur ma concession,
D'affectueuses révérences.

Tantôt venant d'Espagne et tantôt d'Italie,
Tous chargés de parfums, de musiques jolies,
Le Mistral et la Tramontane,
Sur mon dernier sommeil verseront les échos,
De villanelle, un jour, un jour de fandango,
De tarentelle, de sardane.

Et quand prenant ma butte en guise d'oreiller,
Une ondine viendra gentiment sommeiller,
Avec moins que rien de costume,
J'en demande pardon par avance à Jésus,
Si l'ombre de ma croix s'y couche un peu dessus,
Pour un petit bonheur posthume.

Pauvres rois pharaons, pauvre Napoléon,
Pauvres grands disparus gisant au Panthéon,
Pauvres cendres de conséquence,
Vous envierez un peu l'éternel estivant,
Qui fait du pédalo sur la vague en rêvant,
Qui passe sa mort en vacances.

Vous envierez un peu l'éternel estivant,
Qui fait du pédalo sur la vague en rêvant,
Qui passe sa mort en vacances...

 

 

Auteur de presque tous ses textes et compositeur de toutes les musiques de ses chansons, il a cependant également mis des notes sur des poèmes de Paul Fort, Aragon, Hugo, Lamartine, Verlaine, Villon... et 

Antoine Pol pour Les Passantes :

  

 

 

Brassens aimait le jazz et les jazzmen lui rendaient son amour. Ils adoraient interpréter ses chansons et improviser à partir d'elles.

Sa musique a toujours été, contrairement à ce que prétendaient ses détracteurs, incroyablement riche et travaillée.

Ecoutez cette entraînante version du

"Temps ne fait rien à l'affaire" par les Giants du Jazz :

 

 

Jean Ferrat, autre grand de la chanson française lui a rendu ce bel hommage :

 

Les trois géants : Jacques, Léo et Georges réunis pour la première fois le 6 janvier 1969 par le magazine Rock & Folk dans un appartement de la rue St Placide dans le 6e

La table ronde sera en partie diffusée à la radio.

Ci-dessous l'intégralité de ce débat passionné et passionnant  :

 

http://namaste-baba.blogspot.fr/2010/12/brel-brassens-ferre-la-table-ronde-1969.html

 

Terminons enfin sur le plus grand succès de Georges

l'Auvergnat.

L'Auvergnat  était en fait le Breton Marcel, mari de Jeanne. Tous deux ont hébergé Georges impasse Florimont de 1944 à 1968. Le mari, la femme et l'amant sous le même toit ( voir le documentaire plus haut )

  

enregistré en direct à Bobino en 1972.

J'ai eu la chance, très jeune, d'assister debout à ce concert  (il n'y avait plus de place assise).

 

Aujourd'hui tonton ne divise plus, il fait l'unanimité et ses héritiers reprennent ses chansons avec plus ou moins de talent.

Cabrel a repris l'Orage, Renaud et surtout Maxime Le Forestier ont enregistré des albums entiers de chansons de Georges. Maxime, excellent chanteur et guitariste le fait revivre à travers ses disques mais aussi en tournée. 

En haut à droite, le poster qui ornait ma chambre quand j'étais adolescent.


 

 



16/02/2013
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